COVID19 et école à distance: quel(s) enseignement(s) pour les sciences ?

Un dispositif de formation organise des interactions sociales

Nos enseignants en sciences revendiquent la nécessité d’avoir de riches interactions sociales : avoir l’occasion de « vivre » des expériences en classe, de partager « dans le monde réel » des moments d’échanges. Mais en premier lieu, ces interactions sociales sont utiles du point de vue de l’enseignant pour sentir l’ambiance de la classe devant soi. Les extraits suivants sont éloquents :

  • (sur MEET) il est plus difficile de parler à une lettre… La difficulté est qu’on ne voit pas leur visage et qu’on ne peut pas savoir s’ils écoutent, s’ils prennent de notes, s’ils sont en silence… ou tout simplement s’ils sont là. …
  • Finalement, ne pas voir la tête des élèves lorsqu’on donne une explication me prive d’énormément d’information sur leur niveau de compréhension.
  • En classe normale, on peut voir les froncements de sourcils, les mines ennuyées ou les regards attentifs, ce dont on est privé à distance. On ne peut se fier qu’à leur parole. On ne peut pas être sûr s’ils disent que « ça va » pour passer à autre chose.
  • Ce qui m’embête, c’est de ne pas voir les élèves… On leur a dit de ne pas mettre leur caméra pour gagner en qualité, et du coup on ne sait pas s’ils sont là ou non, s’ils suivent ou non. 

Les pratiques qui permettent de faire les petits ajustements que nous faisons d’habitude lors d’une leçon doivent être réinventées.Des gestes aussi simples que gérer la parole, lever la main, observer les signes de fatigue qui s’installent ou l’attention de chacun. Comme le résume un enseignant, en EàD, il est difficile d’interpréter les réactions des élèves, ce qui n’est pas le cas en présentiel.

Comme substitut au cours magistral en classe, la vidéoconférence a déçu, mais elle a cependant permis à certains de retrouver un contact humain avec les élèves, ce qui est nécessaire pour que la relation enseignant – élève fonctionne. Dans certains cas, un effet positif sur la motivation est relevé : après ces rendez-vous MEET, les élèves semblent davantage motivés, les retardataires rendent souvent leur travail manquant.

Le travail en groupe semble être la deuxième victime de l’EàD. Les enseignants s’accorderont sur le fait qu’il est plus difficile de travailler ensemble. Si les élèves ne sont pas réunis, comment les faire travailler en groupe et interagir socialement ? La vidéoconférence est mieux adaptée dans ce contexte de petit groupe (séance de questions), mais aussi de réflexion en groupes durant lequel il est possible d’assigner des « salles » différentes pour les élèves et l’enseignant-e « circule » d’une salle à l’autre.

Si l’on considère que la relation pédagogique repose entre autres sur les échanges entre les acteurs, et qu’enseigner est de toute évidence un métier de l’humain, il est alors nécessaire de mettre en place d’autres canaux de transmissions pour ces échanges. Pour l’instant, nous n’avons évoqué que des modalités d’échange et d’interaction synchrones, celle qui constitue la forme traditionnelle des interactions sociales en classe. Il va de soi que dans le cadre de l’EàD, nous devons investir de nouveaux outils adaptés à une communication en mode asynchrone et surtout non limité à une communication entre l’enseignant-e et l’élève, mais également entre les élèves. Ces outils peuvent prendre différentes formes : une messagerie de groupe, un forum, un sondage, une zone de commentaire… et offrir diverses modalités pour exprimer son humeur (texte, smiley, stickers…). Si ces outils ne sont pas mis en place et pratiqués avec les élèves lors de l’enseignement en présentiel, ceux-ci n’y adhèreront pas spontanément, comme le souligne ce témoignage : j’ai essayé le forum de MOODLE, mais les élèves n’ont pas utilisé cette possibilité : j’ai toujours reçu des questions directes à mon email. C’est ma faute : pour créer des débats sur le forum, je devrai y travailler et poser une question à développer ensemble, seulement sur ce support.

Les outils EDUGE possèdent aussi leur propre canal de communication, mais là aussi, une pratique des interactions sociales doit être instaurée au préalable et ritualisée avec ses élèves. De retour en présentiel, il y a un moyen de communiquer encore plus efficacement avec nos élèves et imaginer des dispositifs pédagogiques simplesquiaugmenter les interactions utiles à l’apprentissage entre les apprenants (évaluation par les pairs…).

Enfin, si comme cela a été relevé les élèves tiennent aux supports qu’ils ont écrits eux-mêmes, à leurs notes, et que ceux-ci aiment bien poster des photos, « liker » des images, pourquoi ne pas donner la possibilité aux élèves de « poster » et partager leur production dans un cadre préalablement défini ? C’est un moyen à considérer lorsqu’on souhaite augmenter leur engagement et leur motivation sur la durée.

Enseignant en biologie au secondaire II depuis .... pffff... longtemps. Formateur MiTic en science ( SEM Formation / IUFE Uni Genève)

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